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Cette carte vous permettra de situer Macapa, capitale de l'état de l'Amapa qui fut un territoire "contesté" entre la France et le jeune Brésil, à la fin du XIXe siècle. Des combats ont même opposé des fusiliers marins français à des soldats brésiliens aux environs de la ville de "Mapa" (nommée "Amapa" de nos jours), combats qui ont fait des dizaines de morts essentiellement du côté brésilien. On a frôlé la guerre mais, sagement, les deux parties se sont abstenues de persévérer dans cette voie et ont recouru à la procédure arbitrale en sollicitant un avis de juristes suisses siégeant à Berne.
Sûrs d'eux, les Français ont envoyé une délégation composée de diplomates de second ordre munis de peu d'arguments - quand les Brésiliens sont arrivés avec d'innombrables traités, cartes, portulans, etc. De mauvaises langues assurent que les Suisses ont également reçu des tonnes du meilleur café brésilien, des émeraudes et autres pierres pécieuses. Quand le "jugement" fut rendu, la frontière qui devait être portée sur l'Amazone selon les voeux français fut établie sur l'Oiapoque (Oyapock). Ce n'est pas anodin, car la région recelait - et recéle toujours - des richesses minières colossales (de l'or bien sûr, mais également du manganèse dans des proportions astronomiques)
Mais bien avant, les Portugais se méfiaient déjà des velléités françaises et ils ont bâti cette forteresse pour contrer une attaque éventuelle. Il est intéressant de savoir que pendant le règne de Napoléon, les Anglais ont profité du désastre de Trafalgar qui avait anéanti la marine française pour occuper la Guyane que le gouverneur, sagement, s'abstint de défendre pour éviter qu'elle ne soit ravagée compte tenu de la disproportion des forces (c'était Victor Hugues envoyé en Guadeloupe par les Révolutionnaires pour abolir l'esclavage et guillotiner toute l'aristocratie, puis en Guyane par Bonaparte pour le rétablir: l'exemple même du "fonctionnaire modèle!) La Guyane conquise, les Anglais ont confié à leurs alliés portugais la tâche de l'occuper et de la conserver, ce qu'ils firent de manière paisible avant de la restituer sans discussion à la France en 1817. Bref, les relations entre la Guyane et l'Amapa voisin ont toujours été un peu "compliquées".
Ce plan de la forteresse donne une idée globale de sa structure (de même que la maquette, ci-dessous)
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L'entrée. A l'époque, il fallait franchir un bras d'eau qui augmentait les difficultés d'accès. En raison des cycles réguliers d'envasement, le drainage du fossé était une activité épuisante et éminemment malsaine à laquelle participaient les soldats et la main d'oeuvre servile.
Vue depuis la cour centrale ; notez les deux drapeaux, celui de la fédération brésilienne et celui de l'état de l'Amapa, le plus récent: il y a un quart de siècle c'était encore un territoire directement administré par Brasilia.
Les remparts. Les canons ont été importés d'Angleterre.
Ce sont des pièces de marine, conçues normalement pour être embarquées.
Une des galeries, qui servait de "pièce de vie". Remarquez les crochets à hamac, utilisés par les hommes pour la nuit. Ce mode de couchage usité au Brésil est parfaitement adapté au climat, et très confortable quand on a saisi la "technique" pour se lover dans le coton.
Une vue de la cour, qui est en pente: au centre on distingue la citerne grillée, qui récupérait les eaux pluviales. Si en saison des pluies l'eau ne devait pas manquer, en saison sèche la situation devait être des plus pénibles dans le cas où la citadelle serait assiégée: un bon millier d'hommes avec uniquement de l'eau croupie en quantité restreinte...
Un filtre à eau (dont l'usage était vraisemblablement réservé aux officiers) La partie supérieure a été sculptée dans une pierre poreuse couramment nommée "roche à ravets" en Guyane. (le ravet étant un énorme cafard, parfaitement répugnant)
L'état de l'Amapa, reconnaissant, a demandé à récupérer les "restes mortels" de Joaquim Caetano da Silva, un des éminents diplomates qui ont agi avec efficacité pour que le territoire demeure brésilien. Ces "restes" reposent dans une des pièces de la citadelle.
A noter que le Chef de la délégation, le baron de Rio Branco, un homme d'une très grande culture et malgré son patriotisme francophile passionné, a engagé une énorme part de sa fortune personnelle pour réunir la documentation adéquate.
De nombreuses villes portent son nom au Brésil
Jeu de lumière dans les galeries, sous les remparts.
L'entrée de la poudrerie. Deux grilles successives en gardaient l'accès.
Depuis les remparts, vue de l'intérieur de la forteresse (au premier plan, une rampe permettant de monter les pièces d'artillerie)
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Pour le reste, il faut bien reconnaître que si Macapa mérite un détour, ça ne vaut pas le voyage (comme on disait dans les anciens Guides Michelin). A part visiter la forteresse, déguster une caipirinha et manger un excellent poisson face au fleuve, on ne peut guère que voir le monument marquant précisément la ligne de l'Equateur (bof...)
Nous signalerons toutefois que la fédération France-Liberté / Danielle Mitterrand est représentée à Macapa où Tatie Danielle s'est rendue plusieurs fois. Cette fondation a agi comme partout dans le domaine de l'accès à l'eau potable pour tous, et elle a contribué à la construction de salles de classes dans les régions isolées de l'état. Salles "moches", très rustiques mais costaudes, destinées à durer... et non à être un objet de prestige. La ville, en signe de remerciement, a donné le nom de Danielle Mitterrand à une salle culturelle. Pas sûr que la dame apprécie vu son caractère de cochon et son refus de se mettre en avant, mais on ne lui a pas demandé son avis.
Benjamin.
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