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J'ai déjà eu l'opportunité d'écrire à quel point, malgré les suspicions que la police et la justice mexicaines soulevaient souvent à juste titre, j'avais plus que des doutes sur l'innocence de Florence Cassez... forcément innocente parce que française et qu'une Française ne saurait être coupable voire même suspecte - même si elle partageait son existence avec un truand notoire, avide qu'elle était de trouver le grand frisson. Eh bien oui, quand on recherche ce grand frisson il arrive qu'on soit bien servie.
Il en est de même, par ailleurs de ces dindes qui se retrouvent avec des bagages dans lesquels se trouvent neuf kilos de cocaïne prétendument glissés à l'insu de leur plein gré. Quand ce sont des Françaises arrêtées à São Paulo par la police fédérale brésilienne, elles sont soit totalement innocentes et victimes d'une effrayante machination, soit des pauvres filles manipulées et méritant de ce fait la plus grand indulgence. Quand ce sont des Brésiliennes interpellées à Roissy, elles sont évidemment coupables et ça ne fait pas débat (d'ailleurs ça n'en fait pas au Brésil où aucun comitié de soutien ne se constitue)
Cela dit, je me souviens fort bien avoir écrit que si d'aventure on croyait à l'innocence de Cassez, le meilleur service qu'on pouvait lui rendre, c'était de la boucler, de faire profil bas et de n'intervenir qu'en sourdine et seulement sur le plan "technique".
Parce que les gringos arrogants et perpétuellement donneurs de leçon qui mettent systématiquement en doute les pratiques locales, les Latinos ne les supportent absolument plus. Quand Sarkozy lance le débat de l'innocence de Cassez en s'impliquant personnellement, en sommant publiquement Calderon de libérer "sa" Française, il surchauffe une opinion publique - et si d'aventure le pouvoir exécutif ou judiciaire mexicain voulaient réexaminer le cas, ils en seraient de facto empêchés sous peine de déclencher une tempête locale.
Plus d'un an de silence après la tempête politique et médiatique... et la Cour de Cassation mexicaine peut enfin se saisir du dossier, l'opinion locale étant préoccupée par d'autres sujets.
Le recours en cassation de Florence Cassez sera examiné jeudi (lien NouvelObs.com)
A noter que l'information pouvait certainement attendre 48 heures avant d'être diffusée; que les bruits de bottes qu'elle risque de soulever au sein des pétitionnaires professionnels risquent d'être contreproductifs (qu'un politicien français éminent ou pire, Béhachel and Co en parlent avant la notification de la décision et c'est plié pour Cassez; dans le mauvais sens)
Et ça, les journalistes qui connaissent un peu le contexte local le savent. Donc quand ils font le tri de ce qui est publiable ou non, dans l'immédiat ou en différé et qu'ils balancent ça aujourd'hui, ils jouent avec le feu.
Cette susceptibilité des Latinos est anormale, direz vous? Peut-être, encore qu'il existe des éléments historiques objectifs qui l'expliquent (lisez et relisez ce qui concerne la doctrine Monroe et son dévoiement au nom desquels la première puissance de gringos a colonisé de facto le sud du Rio-Grande jusqu'à la Terre de feu - et cela pendant plus d'un siècle).
Et pour finir, demandez-vous comment nous aurions réagi si au moment de la condamnation de Patrick Dils coupable, forcément coupable (avant qu'il ne soit innocenté) Mexicains, Brésiliens, Colombiens etc. avaient pétitionné massivement pour critiquer notre système judiciaire (parfait comme chacun sait)
Benjamin
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