____________________________
Les précédentes analyses des propositions du PS sont répertoriées dans la catégorie 18.
22 - Pour davantage de justice dans les impôts, nous fusionnerons l’impôt sur le revenu et la CSG dans un impôt citoyen plus progressif et prélevé à la source.
Deux questions sont traitées en une courte phrase, ce qui est gênant pour la compréhension. Si des gens de gauche ne peuvent qu'applaudir à la première (fusion IRPP et CSG en un même impôt progressif), le prélèvement à la source peut appeler davantage de réserves. Sauf s'il est complété par d'autres mesures.
La CSG est une taxe sur les revenus, proportionnelle: en principe, chacun paye peu ou prou le même pourcentage sur les revenus déclarés, ce qui fait que le poids de ce prélèvement est plus important pour les bas revenus que pour les hauts. L'IRPP est progressif (nul pour les bas revenus, voire négatif: les bénéficiaires de la Prime pour l'Emploi reçoivent un "impôt négatif"), plus élevé pour les moyens et hauts revenus.
A noter que l'IRPP français (le seul impôt individuel équitable) est un des plus bas d'Europe. Sur 272 milliards d'euros de recettes, il ne compte que pour 53 milliards. La tranche "marginale" (la plus élevée) est de 41% sur la part la plus élevée des plus hauts revenus déclarés et imposables.
En France, un célibataire qui a un revenu imposable de 30.000 euros non trafiqué par une flopée de niches fiscales utilisées à bon escient paye au titre de l'IRPP 10% de ses revenus, ce qui ferait rêver pas mal de Suisses ou de Belges dans sa situation (pays pourtant considérés par des "paradis fiscaux" pour qui possède un gros patrimoine) qui payent le double, voire le triple : mais on est moins imposé sur le patrimoine.
A noter enfin que les catégories très supérieures payent légalement beaucoup moins d'impôts que les classes moyennes. Cette année, Bettencourt ne paiera que 4% de ses revenus et ça "montera" à 12% l'an prochain (elle profite de deux avantages fiscaux qui s'additionnent en 2011). Un couple de cadres qui s'échinent 60h par semaine est couramment imposé à 20-25%... à part ça on glorifie la valeur travail.
La fusion CSG - IRPP dans un impôt proportionnel établit plus d'équité. Elle est donc à soutenir sans réserve surtout que c'est courageux, comme toute réforme fiscale d'ampleur: les gagnants n'éprouvent aucune reconnaissance, prenant ce qui leur est donné comme un dû qui arrive tardivement (exemple caricatural de la TVA sur la restauration) et les perdants s'estiment spoliés.
Si les socialistes parviennent au pouvoir et s'ils ont réellement envie d'appliquer cette mesure, ils doivent la mettre en priorité absolue dans le contrat de législature pour qu'elle soit effective dès 2013. Sinon les groupes de pression se déchaîneront et de "concertation" en "concertation" elle sera vidée de sa substance. Ensuite, il y aura quatre années pour que les effets positifs apparaissent, et fassent "passer la pilule": la redistribution de pouvoir d'achat aux plus modestes qui - par force - dépensent tout ce qu'ils gagnent pour vivre au lieu de thésauriser ou spéculer; ça relance l'économie par redistribution, sans injection artificielle d'argent public.
Le prélèvement à la source, maintenant. C'est une obsession chez beaucoup, et on ne perçoit pas l'intérêt dès lors que le prélèvement automatique existe. En outre, comme ce prélèvement à la source passerait par l'employeur, cela lui donnerait accès à des données personnelles (pensions alimentaires qui jouent sur le revenu, déficit des années antérieures pour un travailleur indépendant revenu dans le salariat, etc.)
Il ne se conçoit que dans le cadre d'un réforme de plus grande ampleur qui toucherait aussi le quotient familial, à remplacer par une allocation calculée selon le nombre d'enfants à charge, indépendante des revenus: à dépense constante, le ménage de condition modeste percevra davantage - ça aidera à payer la cantine des gamins, voire quinze jours de vacances - et les nantis n'ont pas besoin de beaucoup plus, eux qui se préoccupent seulement de savoir si en plus du golf et du violoncelle ils pourront offrir des cours de danse classique à leur descendance.
Rien n'est dit, concernant les niches fiscales. Quelques-unes (très peu) sont d'un intérêt évident. D'autres ne sont que des pompes à fric qui puisent dans les caisses de l'Etat dont le déficit actuel tourne autour de 92 milliards d'euros alors que la fraude fiscale et sociale est évaluée à 100 milliards et que les niches coûtent entre 40 et 55 milliards chaque année.
Le principe? Pas de "coup de rabot", mais partir avec l'idée que toutes sont à revoir. Et les examiner une à une en fonction de leur pertinence réelle sans se soucier des "groupes de pression". On signalera entre autres le scandale de la défiscalisation en outre-mer qui ne rapporte rien sur place (il y a toujours pénurie de logements accessibles à la population locale, pas mal de gens ont été victimes d'aigrefins sans scrupule et ça coûte des milliards à l'Etat) Et au nom de quoi, parce qu'on vit aux Antilles, devrait-on payer 30% d'IRPP en moins (40% en Guyane) sous prétexte de "vie chère" dès lors que ceux qui n'ont pas la chance de gagner assez pour payer des impôts n'ont aucune compensation?
Il est évident que pour les situations fiscales qui seraient profondément modifiées, il faut prévoir une application progressive: par exemple, un contribuable guyanais dont l'impôt aligné sur le "tarif" national augmentera substantiellement bénéficiera d'un échéancier qui lui permettra d'organiser sa vie en conséquence. L'équité ne doit pas mener à des faillites personnelles.
benjamin
Les commentaires récents