Cette note est la première de 'Jsln", jeune étudiant franco-brésilien à qui je suis lié par une solide amitié, qui nous livrera de temps à autre un point de vue distancié sur la société française, sur l'Europe, et toute cette sorte de choses.
Jsln est déjà intervenu sur le problème de la binationalité.
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Je ferai une comparaison avec ce que je connais: le MERCOSUL qui unit mon second pays, le Brésil, à d'autres situés dans le cône sud de l'Amérique latine (qu'est ce que je dis là! Je m'avoue binational... la tare suprême par les temps qui courent)
Nous nous entendons fort bien au sein du MERCOSUL, mais nous sommes chacun chez nous (c'est sans doute pour ça que nous nous entendons bien!). le premier partenaire du Brésil c'est l'Argentine (malgré un contentieux historique, sauf que nous avons été assez intelligents pour ne pas nous faire la guerre comme vous, Européens, civilisations "supérieures", qui vous êtes cordialement massacrées à peu près sans interruption jusqu’il y a peu de temps)
Nous gérons notre Réal, les Argentins gèrent leur Peso, selon nos intérêts respectifs et qui ne se fondent pas que sur "la lutte contre la hausse des prix" combattue par une banque "indépendante": la monnaie est un instrument de souveraineté, et on s'en sert comme moyen de gouvernance économique et si nous en jugeons par notre taux de croissance, ça ne nous réussit pas trop mal. Vous n'aimeriez pas naviguer entre 5 et 7% de croissance par an dans votre UE?
Le MERCOSUL est une zone de libre échange... MAIS:
1/ avec des restrictions quand la concurrence est manifestement faussée. Nous importons nos haricots d'Argentine alors que c'est la base de notre alimentation et que nous en exportions dans le monde entier il y a une décennie, parce que les Argentins acceptent notre riz sans taxes et parce que les standards de coût sont à peu près identiques. En revanche nos Embraers sont taxés chez eux et nous taxons leur textile (ces barrières diminuent très progressivement pour permettre l'adaptation et pas la destruction du tissu industriel).
2/ Avec des taxes correctrices quand il y a distorsion de concurrence manifeste. Le Paraguay qui est un peu "voyou" en souffre quelque peu, jusqu'à ce qu'il adopte des méthodes plus civilisées... il l'admet parfaitement.
Sur nos passeports il est bien marqué "MERCOSUL / MERSOSUR, mais nous "subissons" un contrôle frontalier quand nous passons d'un pays à l'autre et nous ne nous sentons pas enfermés pour ça: au contraire, ça aide à lutter contre les trafics et la contrebande, comme contre la criminalité.
Vous me faites bien rigoler, en Europe, quand vous vous extasiez devant la possibilité de passer de France en Pologne sans contrôle, alors que vous admettez qu'on épluche méticuleusement vos papiers et qu'on vous fouille sans raison trois fois par jour, entre votre domicile et votre lieu d'activité, dans votre propre pays.
Quand nous passons des accords entre pays du MERCOSUL, c'est sur la base de l'acceptation et de la convivialité: pas parce qu'une bureaucratie extra nationale nous l'impose.
Récemment, les Brésiliens ont modifié de leur plein gré sur demande des intéressés la répartition des ressources du gigantesque barrage trans-frontalier d'Itaipu, au profit du Paraguay (qui va voir ses bénéfices tripler) et c'est très bien passé.
Nous l'aurait-on imposé de l'équivalent de votre Bruxelles, que ça aurait été la révolte.
Bref nous faisons les choses à notre rythme, en donnant aux peuples le temps de s'adapter, de digérer les progrès de la construction du MERCOSUL... et sans rêver: vous ne ferez jamais d'un Brésilien un Argentin, et réciproquement.
Que l'UE sorte un peu de son arrogance et aille voir ailleurs comment d'autres modèles fonctionnent. Elle y gagnera en psychologie, en pragmatisme et surtout en efficacité.
Jsln. Mise en forme, illustrations de benjamin
Le prochain billet de Jsln: les Brésiliens s'aiment trop; les Français ne s'aiment pas - ils se méprisent même cordialement.
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