_______________________
Quand un acteur de terrain incontestable vous dit ce qu'il pense des interventions militaires humanitaires, ça vaut son pesant de sel.
En substance...
Chaque fois qu'on a voulu instaurer la démocratie ou protéger des populations de massacres avec des bombes, les massacres qui sont survenus après ont été pires.
Cet entretien qui fit scandale fin mars est à déguster (amèrement... on aimerait tellement qu'il ait eu tort) à l'aune de ce qu'on sait en août!
Autre voix dissonnante: Philippe Bilger. (NB. On ne dira pas que je suis fermé à qui ne pense pas comme moi!)
Je me souviens d'un dîner-débat organisé le 26 avril par un club de réflexion auquel j'envisageais de m'affilier. C'était ma première expérience. J'ai compris que ce genre de réunion n'était pas pour moi même si en l'occurrence cette soirée s'est déroulée sous l'égide bienveillante de Jean-Claude Guillebaud et qu'elle m'a permis d'entendre, notamment, Régis Debray et l'une des deux personnes invitées à débattre qui était Rony Brauman.
J'ai encore dans l'oreille toutes les réserves exprimées par ce dernier au sujet de l'intervention française en Libye. Même s'il tenait compte de l'aval de l'ONU, il dénonçait le manque de préparation, l'absence de données sur la structure de ce pays et au moins sur sa division profonde entre Tripoli et Benghazi, les finalités floues de l'expédition - s'agissait-il d'éviter un massacre et il affirmait que rien ne permettait de le croire certain ou de se débarrasser de Kadhafi ? - et le risque d'enlisement et de délitement de celle-ci. Il était moins convaincant à mon sens dans les propositions mais affirmait cependant qu'il existait mille autres moyens, mais de nature politique et avec une contrainte internationale excluant la force, pour aboutir à la sauvegarde des droits de l'homme et à terme à l'effacement de Kadhafi.
Même si la majorité des convives n'était pas éloignée de sa vision, je me rappelle que j'ai eu du mal à résister à un mouvement qui me conduisait immédiatement à dénoncer la frilosité, voire le trop peu de patriotisme de Rony Brauman ! Au fil de la soirée, sa réplique toujours mesurée et intelligente aux interrogations formulées a emporté la conviction de beaucoup, même parmi les rares rétifs de prime abord. Je ne me disais plus que Rony Brauman avait forcément tort mais qu'il y avait du courage à avoir raison, peut-être, comme lui.
La suite des événements a montré que son analyse était absolument pertinente. A nouveau j'ai perçu le danger de ces intellectuels, philosophes ou autres qui au nom des droits de l'homme, invoqués sans cesse comme un étendard magique qui dispenserait de toute réflexion , étaient prêts à jeter les autres sur les sentiers d'une guerre qu'ils décrétaient juste. Et il fallait se contenter, si j'ose dire, de cet imprimatur !
Bernard-Henri Lévy, vibrion guerrier et inspirateur de la politique française en Libye avant qu'Alain Juppé reprenne les choses en main, plaît par son enthousiasme naïf** et sa conviction vite faite : en 24 heures, les troupes de Kadhafi, des mercenaires, se débanderaient ! On s'aperçoit vite que ces va-t-en guerre abstraits ont tort ! [[écrit en mai]]
Après viennent les Rony Brauman.
Trop tard.
** il ne plaît pas à tout le monde, euphémisme. En tout cas ici, il ne plaît pas.
benjamin
Les commentaires récents