Le coup de grâce est donné à la crédibilité du plan de Sarkozy** et le meurtrier se nomme Berlusconi.
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** Feignons d'être l'organisateur de ce qui nous dépasse.
Sarkozy a choisi la voie de la subordination aux "Marchés". Logiquement, compte tenu des intérêts qu'il défend et de son électorat davantage préoccupé de la sécurisation de l'épargne et de la rente que de celle de l'emploi et des revenus du travail. Au delà des effets d'annonce, on ne touche pas au système, on se vautre dedans. Seulement quand on veut jouer dans une cour, on en respecte les usages et ce que Berlusconi met en route montre à quel point Sarkozy, obsédé par sa réélection, est en dehors du coup.
Sur instruction présidentielle Baroin évoque "trois milliards d'économie" en rabotant quelques niches fiscales (en reportant les arbitrages à la fin de l'été... création d'incertitude et les "Marchés" ne détestent rien de plus que l'incertitude), Pécresse nie l'évidence (les mensonges ne rassurent pas non plus) en assurant que les impots n'augmenteront pas: qu'on joue sur les taux ou sur l'assiette par des aménagement de niches, si vous payez plus en fin de compte les impôts augmentent ; tout le reste n'est que baliverne. Autre mensonge ravageur pour la crédibilité: la persistance de l'annonce d'une croissance de 2% en 2011, sur laquelle toutes les prévisions sont bâties: un gratte-ciel bâti sur du sable, sans fondations.
Mais dans le même temps, Berlusconi qui gouverne un pays peu ou prou dans la situation de la France prend le problème à bras le corps.
L'Italie adopte une taxe sur les hauts revenus et un plan de rigueur de 45,5 milliards d'euros sur deux ans (lien le monde.fr).
Extraits
Le gouvernement italien a annoncé l'adoption en conseil des ministres d'un nouveau plan de rigueur de 45,5 milliards d'euros sur deux ans, pour revenir à l'équilibre dès 2013 au lieu de 2014 et stopper les pressions spéculatives des marchés. /...
Le nouveau plan permettra de récupérer 20 milliards en 2012 et 25,5 milliards en 2013, selon M. Berlusconi. L'Italie avait déjà adopté une cure d'austérité de 48 milliards sur trois ans à la mi-juillet. /... [[NB. 93 milliards en trois ans]]
Le chef du gouvernement a accepté d'alourdir la pression fiscale, avec une taxe de solidarité sur les revenus les plus élevés (plus de 90 000 euros par an). /...
Les autres mesures fortes sont la fusion de provinces (trente-huit disparaîtront) et de communes (quinze cents devraient fusionner) et l'anticipation à 2016 de l'accroissement progressif de l'âge de départ en retraite des femmes à 65 ans.
Les coûts de la politique seront également taillés avec la suppression de 50 000 postes d'élus au niveau de l'Etat central et des collectivités locales. La productivité sera augmentée par la suppression des ponts et le transfert automatique des fêtes nationales sur le lundi. Les transferts de l'Etat aux collectivités locales seront fortement réduits.
Pour lutter contre l'évasion fiscale, il deviendra obligatoire de déclarer les transactions de plus de 2 500 euros et de dures sanctions sont prévues pour les activités ne délivrant pas de facture ou de ticket de caisse, pouvant aller jusqu'à la fermeture.
Trois milliards d'un côté des Alpes, Quatre ving-treize de l'autre. Qui rassurera les Marchés, à supposer qu'ils fussent rassurables? (l'auteur de cette note est loin de cautionner la logique berlusconienne; il se contente de constater sa cohérence)
Pourtant Berlusconi est également sous le coup d'élections générales proches et pour lui, l'enjeu est autrement grave: en cas de défaite, la fin de son impunité pourrait le mener directement à la case prison; il ne semble pas que Sarkozy soit dans cette situation.
Deux populistes de droite, libéraux assumés. Mais l'Italien est cohérent avec sa doctrine. Ses actes vont dans le sens voulu par "les Marchés", les agences de notation, et toute cette sorte de choses.
Quand dans le même temps Sarkozy répète sa volonté de ne pas revenir sur l'abaissement à 5,5% du taux de TVA dans la restauration, soutenant mordicus pour se justifier qu'il fut bénéfique pour l'emploi, il se couvre de ridicule et plus grave, il perd sa crédibilité (en prenant le nombre sujet à caution annoncé par les restaurateurs, 40.000 emplois créés, on aboutit à une subvention déguisée de 68.000 € par emploi payé à 101% du SMIC... On connaît mieux comme emploi des finances publiques - et les ingrats ne disent même pas "merci").
Les faits sont têtus. Au lieu de se gaver de "généralités générales" sur une hypothétique règle d'or que ses successeurs devraient respecter à la lettre quand il en serait affranchi avant les élections (puisqu'elle ne prendrait effet qu'en 2013) - règle d'or qui existe déjà puisqu'elle figure dans le Traité de Maastricht ratifié par référendum - si Sarkozy veut "rassurer les Marchés" au lieu de se situer dans une autre logique, il doit abandonner l'homéopathie pour la chimothérapie lourde. Certes elle tuera le malade, mais il aura le bonheur de mourir guéri.
Van Rompuy se félicite du plan de rigueur en Italie (lemonde.fr)
benjamin borghésio
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