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Dans une note précédente, les communications de crise furent évoquées, avec leurs principes intangibles. On sait désormais que de la qualité de cette dernière dépend une bonne part de la résolution de la crise, parfois davantage que des mesures concrètes sur le terrain. Un mot de trop, une gesticulation** erronée, et c'est le Maelström.
Nous l'avons vu avec la Société Générale dont plus du cinquième de la capitalisation boursière est parti en fumée en 48 heures, suite à une rumeur (notez que par le jeu de la spéculation à la baisse comme par les initiés aux "lois" de la bourse, le menu fretin aura été dépouillé quand quelques gros poissons se seront remplis les poches). Un tabloïd britannique répercute un de ces bruits de couloir comme il y en a des centaines chaque jour dans les milieux financiers: "trop engagée en grèce et en Italie, la SocGen est en faillite, cela sera anoncé dans la journée". Normalement cela provoque un sursaut... l'établissement rachète quelques-uns de ses propres titres en demandant à des "collègues" de faire de même et la correction est immédiate.
Seulement cette péripérie a coincidé avec un retour précipité du Président à l'Elysée alors qu'il communiquait sur le fait que la situation ne l'exigeait pas, que les ministres tenaient la boutique en liaison avec le Cap Nègre. Simple réunion de travail, qu'il a dit. Pour "les Marchés", c'était aussi crédible que ne l'était Daladier quand il annonça une situation parfaitement sous contrôle (en mai 1940) en plein exode. La piétaille fut convaincue de la véracité de la rumeur malgré un piteux démenti assorti d'excuses du torchon anglais qui en était à l'origine: Sarkozy rentrait dans la panique pour organiser une nationalisation-sauvetage de la banque. Conséquence: descente aux enfers pour le titre comme pour d'autres.
On connaît pire contempteur (euphémisme) du libéralisme financiarisé et de la Bourse que JM Sylvestre. Il n'empêche: hier il eut lors de C dans l'air des mots très durs contre cette précipitation. Non seulement Sakozy défend ce système pied à pied mais en plus il se révèle incapable de s'y adapter. Zéro pointé et nos condoléances attristées pour les petits actionnaires qui ont encore laissé plus que des plumes dans l'affaire.
** gesticulation est à prendre au sens stratégique et non au sens habituel, qui revet une connotation péjorative: il s'agit de la démonstration par les paroles et les actes, qui vise à convanincre l'adversaire de sa résolution. Sur le plan militaire, par exemple, cela peut être le départ d'une escadre. Sur le plan financier, gesticuler efficacement consiste le plus souvent à... ne rien faire d'apparent, ou faire très vite et très fort. Sûrement pas une réunion le 10, pour annoncer une rencontre avec Merkel le 16 et des décisions actées le 24!
benjamin borghésio
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