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Le sénateur de l'Ariège, Jean-Pierre Bel, 59 ans, a été élu samedi 1er octobre par ses pairs, premier président socialiste de l'histoire du Sénat sous la Ve République. Il devient le deuxième personnage de l'Etat. Selon le décompte du Sénat, il a été élu dès le premier tour par 179 voix (soit deux voix de plus que le nombre de sénateurs socialistes). Le président UMP sortant, Gérard Larcher, a obtenu 134 fait voix, soit 6 de moins que le total UMP. Valérie Létard, 29 voix, soit 2 de moins que les 31 membres de son groupe centriste.
Jean-Pierre Bel a obtenu 7 voix de plus que la majorité absolue des suffrages exprimés, et surtout plus de voix qu'attendu, tandis que Valérie Létard a fait un score inférieur aux prédictions. Sur les 347 votants, on compte 5 bulletins nuls ou blanc, soit 342 suffrages exprimés. La majorité était donc à 172. Président du groupe socialiste du Sénat depuis 2004, Jean-Pierre Bel a fait irruption sur le devant de la scène avec le basculement inédit à gauche de la deuxième chambre du Parlement, lors du renouvellement sénatorial de dimanche dernier. (agences)
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Première remarque: l'auteur de ce blog s'est planté quand il a écrit qu'il y avait peu de chances que la majorité absolue "théorique" de JP Bel suffise. (note du 26 septembre). Il pensait comme Raffarin que les manoeuvres de couloir, les conciliabules discrets, les promesses feutrées, les bouteilles de la cave somptueuse du Palais Médicis débouchées, parviendraient à obtenir que Larcher trouve une majorité autour de l'homme, en lieu et place d'une majorité d'idées.
Autre cause... la toujours possible "irresponsabilité" des Verts, surtout qu'ils sont représentés au Sénat par ce qu'on fait à peu près de pire en magouille politicarde - à savoir le Sieur JV Placé, le type qui accumule des milliers d'euros en PV dans les voitures du Conseil régional d'Île de France pour excès de vitesse, mais qui veut interdire au Français lambda de rouler dans son véhicule personnel au nom de l'écologie confiscatoire. Il a d'ailleurs confirmé mes doutes en menaçant jusqu'à la dernière minute de se présenter au nom de ses amis, pour faire monter les enchères avant de renoncer parce que JP Bel lui avait donné des assurances fortes (traduisez: des promesses de prébendes).
Un conseil à donner au PS: si d'aventure il devait gagner en 2012 (ce n'est pas encore fait), qu'il s'arrange pour que ce soit assez largement pour ne pas avoir besoin de ces zozos, et ensuite qu'il fasse par lui même une politique qui donne réellement toute sa place à l'écologie - manière de démontrer par l'exemple qu'on n'a nul besoin des Verts pour traiter de ces sujets (qui de surcroît occupent une part très réduite de leur discours). Sinon ils seront pour lui ce que le sparadrap fut au capitaine Haddock.
Surprise aussi, avec cette majorité plus large que prévu et là, deux hypothèses (difficile d'analyser ce qui se passe dans le secret de l'urne).
- La tendance Sarkozy-Fillon l'a emporté sur la tendance Raffarin, trop "ensénatisé" pour être lucide et le bon sens a prévalu: une victoire de Larcher serait apparue le résultat d'une telle magouille, que le remède eut été pire que le mal. Donc on a pu "suggérer" à quelques sénateurs de déposer un bulletin blanc ou nul pour assurer le coup.
(photo ci-contre: oui, c'est bien Raffarin! Aux parents qui désespèrent parfois, on peut dire que tout espoir n'est jamais perdu.)
- Il y a vraiment parmi les survivants - surtout ceux qui voient échapper une vice-présidence ou une présidence de commission - de la rancoeur et d'aucuns ont sans doute aussi voulu enfoncer le clou pour des motifs de fond.
Bis repetita, la réforme des collectivités territoriales (qui au demeurant n'avait pas que des aspects nocifs) a rendu certains élus locaux ivres de fureur, parce qu'en plus de rationnaliser le système (le côté positif... quoique que le mille-feuilles qui succède au précédent n'est guère plus lisible), la recentralisation de fait et la diminution sauvage des dotations (suppression de la taxe professionnelle, très mal compensée entre autres) asphyxie les collectivités. Enfin, le mode de désignation des nouveaux conseillers territoriaux est inacceptable (et encore! à l'origine Sarkozy voulut imposer un scrutin majoritaire à UN tour. On aurait pu être élu avec 20% des voix...)
Contrairement à ce qui se dit ici ou là, il y a relativement peu de chance** pour que Sarkozy soit lourdé par son propre camp et empêché de défendre ses chances (tout au plus, mais je n'y crois pas trop, décidera-t-il de ne pas se représenter, persuadé en bon caractériel qu'il est que ces connards ne le méritent pas et/ou qu'il n'y a aucune perspective de victoire, si les prévisions se révèlent par trop calamiteuses. Il a suffisamment d'échappatoires pour se défausser en tentant de ne pas perdre la face: sa paternité récente, un éventuel problème de santé (l'anosognosie, ce serait une bonne idée pour ne pas répondre aux juges sur Bettencourt, Karachi, etc.).
A noter que contrairement à une idée reçue, Sarkozy ne fut pas toujours la bête de campagne que d'aucuns décrivent: certes il a (bien) gagné en 2007, mais ce fut face à une adversaire d'une incompétence crasse, guère soutenue en dehors du cercle de ses fans énamourés. Sinon, à son palmarès on a une défaite calamiteuse aux Européennes (il conduisait la liste) et des succès à Neuilly, quand on est de droite, ce n'est pas difficile. Les élus de terrain le savent et ça les tétanise dans la conjoncture du moment. En juin 2012, il y aura pas beaucoup d'affiches: Trucmuche, derrière Sarkozy... ce sera le retour du bon vieil "apolitisme", des candidats qui "défendent la circonscription avant tout"...
Fillon a bien vu le coup: le recul cinglant de la droite au Sénat (même si une manoeuvre aurait empêché l'élection de Bel) tétanise les élus qui dès maintenant ne pensent plus qu'à sauver leur siège.
On va déserter les hémicycles, les instances dirigeantes, pour labourer le terrain. Gageons qu'il y aura des surprises lors des débats à venir, causées par l'absentéisme.
** Si ça devait se produire, on le découvrirait ainsi: les documents "qui tuent" sur Karachi, les mallets, l'Afrique, la campagne Balladur, etc. viendraient manifestement du sérail. Pour le moment, ce qui sort ne fait que blesser.
benjamin borghésio
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