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Les choses sont claires. Aubry est décidée à tout faire pour que la "chochotte" le "grand méchant mou", le "candidat du système"©le Pen, etc. soit battu.
Dans ces conditions, on ne se gênera pas à gauche pour soulever - courtoisement - les différends fondamentaux qui nous séparent d'un parti qui n'a plus de socialiste que le nom. Quelle est chez Aubry la part de la rancoeur après sa défaite? Quelle est celle du refus, conscient ou non, de voir son parti assumer les responsabilités du pouvoir dès lors que ce qui tient lieu de social-démocratie européenne tiédasse s'est déshonoré et a perdu toute crédibilité, en plus d'avoir abdiqué en cédant toutes les marges de manoeuvre à la technostructure et aux oligarchies financières?
Revenons quelques semaines en arrière. Le seul clivage quelque peu significatif entre Hollande et Aubry, c'était le nucléaire que la première voulait abandonner pour complaire aux "alliés" d'EELV - au mépris de toute logique économique, sociale et même environnementale (compte tenu du pic pétrolier qui surviendra vraisemblablement d'ici une décennie, et de l'absence - pour le moment - d'une alternative sérieuse - sauf à abandonner l'objectif impératif de réduction des émanations de CO2 qui sont LE danger majeur à moyen terme).
Hollande, plus réaliste, a tenu à maintenir cette filière "le temps qu'on y voie clair" et a proposé un objectif de 50% d'électricité d'origine nucléaire en 2025 (contre 72% actuellement). Pour sécuriser la filière, il a défendu le maintien d'une R&D dans le secteur: il est clair que pour être en mesure de fermer de "vieilles" centrales, il faut pouvoir moderniser les autres, affiner les procédures de sécurité et développer au moins un réacteur de nouvelle génération.
Le résultat des primaires socialistes a été on ne peut plus clair... la ligne Aubry a perdu nettement, malgré le soutien des Verts qui ont voté pour influencer le choix du candidat d'un parti qui n'est pas le leur... difficile de faire mieux en matière de forfaiture. Seulement si Hollande est le candidat, Aubry tient l'appareil et elle a conduit le résultat des "négociations" avec les Verts, de main de maître. Un sabotage lumineux!
Pour quel résultat? Les Verts, Grands Donneurs de Leçons de Morale et d'Ethique devant l'Eternel indiquaient en substance que si Hollande ne s'alignait pas sur tout leur programme, il n'y aurait ni accord politique, ni accord électoral. Ils étaient même prêts à n'avoir aucun député plutôt que renoncer à leurs fondamentaux... et l'EPR de Flamanville faisait partie de ces fondamentaux. En foi de quoi, 48 heures après et bien que Hollande n'avait pas cédé sur l'EPR, les Verts signaient, contre... 60 circonscription dont de 15 à 30 gagnables. Les promesses n'engagent que ceux qui y croient... comme disait Pasqua dont Duflot est devenue disciple.
Mercredi 15 novembre, Hollande veut reprendre la main en révélant la composition de son équipe de campagne. Bingo! Aubry sabote délibérément cette présentation en faisant de cette journée une cacophonie qui dépasse tout ce que Royal a fait subir au PS en 2007.
1/ Dans l'accord électoral, est acté le parachutage de Duflot à Paris dans une circonscription en principe béton pour la gauche, tenue par Danielle Hoffman-Rispal (alors que la pente est de maintenir les femmes où elles sont et de remplacer des hommes sur le départ pour renforcer la parité). Cette dernière a deux gros défauts: c'est une militante de terrain là depuis plus de trente ans, elle fut réélue avec plus de 60% des voix en 2007. On ne va quand même pas demander à Duflot de se colleter vraiment au suffrage universel... Idem, l'inénarrable Meirieu est parachuté à Lyon où il est cordialement détesté à cause de son systématique manque de loyauté au conseil régional.
Coup de billard à trois bandes d'Aubry qui tacle ainsi Delanoé, Hidalgo (sa première adjointe qui tentera de reprendre le flambeau en 2014, Delanoé ne se représentant pas) et Collomb, maire de Lyon. Leur crime? Avoir joué loyalement la carte Hollande avant ou dès la fin des primaires et ça, Aubry ne le supporte pas.
2/ Dans la négociation, Aubry, de manière apparemment inepte (pardon pour l'aspect technique) admet la quasi disparition de la filière MOX (ce combustible pour les centrales nucléaires que la France produit à la Hague, et utilise dans ses réacteurs). Or le fonctionnement de l'EPR est moins rentable sans ce MOX qui en outre la filière donne du travail à des milliers de salariés. D'où le coup de poing sur la table de Hollande obligé de remettre de la cohérence, d'où la cacophonie amplifiée par les couinements de Duflot qui parle d'accord signé, de parole donnée, et toute cette sorte de choses.
Ajoutons à cela des fuites orchestrées sur des interventions d'AREVA qui font passer le candidat socialiste pour un VRP désigné du nucléaire, et on a une petite idée des dégats qu'une seule journée de sabotage d'Aubry peut engendrer. Florilège...
Mamère: "Si le PS, sous la pression d'Areva et du lobby nucléaire, décide de changer d'avis, cela va changer la donne pour nous et on ne peut pas construire l'avenir et une pacte majoritaire avec des gens qui renient leur parole".
Duflot: (tweet): "Suis une femme pas compliquée : un accord passé est un accord qui engage. Pas d'autres commentaires :-)"
Hidalgo, en public à Aubry: "Que je ne te croise plus jamais!". Soutien indéfectible de la première secrétaire pendant les primaires, elle lui voue désormais une haine tenace: ses magouilles risquent de priver les socialistes de la mairie de Paris en 2014!
Danielle Hoffman-Rispal, députée de Paris bazardée sans préavis: "je serai candidate à Paris contre Duflot" (m'est avis que la pimbêche saura des problèmes si d'aventure elle doit se colleter à la sortante... lisez les commentaires de l'article, ainsi que ceux là)
Gérard Collomb, au bureau national du PS, à propos du parachutage de Meirieu: "C'est impossible ! Dans le Rhône, on fait un accord qui va condamner les socialistes pour 2014. Les Lyonnais ne comprendraient pas que je soutienne ce candidat." Collomb a déjà acté une possible exclusion du PS, prêt qu'il est à soutenir un dissident.
Bis repetita, Si Hollande perd les élections à venir, on datera du 15 novembre 2011 le début de sa fin. Ou il parvient à se débarrasser des apparatchiks de la bande à Aubry qui veut sa peau, ou il est mort.
Et s'il doit cavaler après une Duflot pour rattraper des bouts de paragraphes qui traînent sur des accords, on le voit mal négocier en tête à tête avec Merkel - et encore moins face à Poutine ou Hu Jin Tao. Enfin, après ce florilège, on dira en souriant que l'apostrophe de "capitaine de pédalo dans la tempête" qu'on a reprochée à Mélenchon avec des gloussements de volaille effrayée n'est que très peu de choses: Mélenchon est un concurrent... il n'est plus membre du parti de Hollande.
benjamin borghésio
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