Que ce soit à droite ou "à gauche", rares furent les scrutins qui furent l'occasion d'une telle foire d'empoigne à propos des législatives.
___________________________________
A droite, deux crises emblématiques. Le buzz, c'est l'arrivée à Paris de Fillon qui abandonne courageusement sa circonscription de Sablé à qui il doit toute sa carrière politique. Ayant des doutes sur son avenir local dans un fief qu'il a pourtant gâté au point, durant ses cinq années passées à Matignon, de le visiter chaque semaine en avion quand il est desservi par le TGV, il expulse Dati du terrain qu'on lui fit labourer dès les municipales de 2008 avant de la répudier une fois le sale boulot fait: une réforme de la carte judiciaire menée à la hache; l'appel vers "les minorités" plus de mode, au moment où chantent les sirènes lepénistes. Les hiérarques UMP se sont imposés et les trois femmes députées sortantes de Paris sont renvoyées à la cuisine. Ne seront présentées des candidates que là où il n'y a aucune chance de voir gagner l'UMP: triomphe de la parité!
A Boulogne, Guéant (qui ne s'est jamais frotté au suffrage universel et qui a des doutes sur ses aptitudes) expulse de Boulogne où en principe c'est gagné d'avance le candidat naturel, suppléant du sortant, lequel annonce son intention fde faire dissidence. Boulette magistrale, pour commencer, avec une déclaration de candidature distribuée à la population faite sur... papier à entête du Ministère de l'Intérieur, motif possible à annulation du scrutin (une jurisprudence est établie)
Au PS, ce qui choqua le plus fut sans doute Royal qui s'impose à la Rochelle, appuyée par la direction, au grand dam des militants locaux qui protestent (on croyait pourtant que sa démocratie participative faisait de Royal une leader incontestée dans sa région...) et une candidature dissidente est possible.
La réaction de Royal est stupéfiante: "j'ai quand même droit à des égards"... Depuis quand une défaite lors d'une élection présidentielle en principe imperdable en 2007 suivie d'une raclée lors des primaires de 2008 donnerait-elle droit à des égards et à ce qu'elle fasse preuve de présomption en vendant la peau de l'ours... réclamant par anticipation le perchoir de l'Assemblée nationale?
L'accord PS-EELV a laissé des traces indélibiles, avec son côté politicard. Reniement des idées de nombre de Verts qui auraient préféré aucune signature au maintien du nucléaire (ils ont tort, mais c'est leur droit), qui héritent d'un improbable marchandage mais qui observent la joie de leurs apparatchiks à l'origine assurés d'être élus: deux figures emblématiques en particulier avec Duflot et Meirieu, qu'on imagine mal élus sur leur tronche et leur personnalité ailleurs que dans une réserve de bobos. Nous avons expliqué dans les notes "Aubry vote Sarkozy" et "Aubry & Joly votent Sarkozy à quel point les haines au sein du PS et les désirs effrénés de captation de pouvoir chez les Verts passaient avant un minimum d'éthique.
Aubry a "par hasard" sélectionné certaines circonscriptions "en or" pour les concéder aux Verts... Dont celle, offerte à Duflot, de D. Hoffman-Rispal, à Paris, militante de terrain qu'elle laboura des années avant de conquérir son écharpe, très appréciée sur place (une femme remplacerait une femme si Duflot gagnait - ce qui est contraire aux accords sur la parité). Hoffman-Rispal soutint certes Aubry, mais elle commit le crime inexpiable - comme Hidalgo - de s'être ralliée loyalement à Hollande dès le lendemain de sa victoire. Autre cadeau royal fait au fossoyeur de l'école publique, Meirieu, placé dans une circonscription en or de Lyon au grand dam de Collomb: l'ayatollah Meirieu élu au conseil régional ne cesse de tirer dans les pattes du Grand Lyon, au mépris même de la solidarité de groupe (mais Collomb était "hollandais", crime inexpiable).
Seulement "trop c'est trop" et ça coince. Il semble que Duflot se verra opposer une dissidente socialiste soutenue par Delanoë, de même que Meirieu aura affaire à forte partie à Lyon. Montebourg non plus ne lâche pas l'affaire, qui a tenu des propos en "Off" que crânement, il ne dément pas:
Parmi ces problèmes /..., il-y-a celui, urgent et grave selon lui, du réchauffement climatique. "Pour mes petits-enfants, a-t-il dit, cette question sera une question de vie ou de mort." Il fait alors référence aux derniers travaux du GIEC qui évoquent des évolutions de température potentiellement dramatiques et poursuit son raisonnement en notant que ces propos-là, ceux aussi de Jean-marc Jancovici, "ne sont entendus par personne". /...
"François Hollande a raison de parler de la transition énergétique, c’est-à-dire de la sortie du pétrole, car c’est cela le vrai débat."/...
Autour de la table, nous nous amusons : au Creusot, lui dit-on, sur ses terres d’élection où Areva fabrique des pièces pour les centrales nucléaires, on doit être content d’entendre ce discours. Mais Arnaud Montebourg ne veut pas plaisanter : "Pas qu’au Creusot, partout en France. Les gens sont attachés au nucléaire, et ils voient aussi dans cette industrie une part de l’indépendance nationale."
Mi-amusés, mi-sérieux, nous lui faisons alors remarquer que son discours n’est pas conforme à l’accord politique que le parti socialiste, dont il est l’un des dirigeants, a passé avec les écologistes d’Europe Ecologie-Les verts. Il en convient sans détours :
"Je n’ai pas voté cet accord, dit-il, je n’en suis pas solidaire". Mais la fermeture des 24 centrales qu’il contient ? "Nous ne le ferons pas", assure-t-il, et il poursuit en expliquant que c’est en raison de ces désaccords qu’une candidate socialiste sera présente, dans l’une des circonscriptions législatives de Saône-et-Loire, pour faire échec à la candidate des Verts qui s’y présente en vertu de l’accord électoral passé entre le PS et les écolos. "Et ce sera pareil à Paris, insiste-t-il, où nous ferons battre Cécile Duflot."
Nous regrettons évidemment, autour de la table, que ses propos demeurent confidentiels. Je lui demande alors si je peux les faire figurer sur le blog. Et c’est avec son accord que je les ai donc reproduits ici.
Complément dans lemonde.fr:
Concernant les législatives, M. Montebourg "regrette la présentation faite par M. Aphatie". Mais, sur ce point non plus, il ne dément rien. "Aujourd'hui, tout le monde peut constater que les militants socialistes parisiens, et non des moindres, puisqu'il y a parmi eux des personnalités comme Bertrand Delanoë et Anne Hidalgo [le maire et sa première adjointe], sont très remontés contre la candidature de Mme Duflot à Paris, et souhaitent que Danièle Hoffman-Rispal [députée socialiste sortante] soit candidate en juin."
Refusant d' "entrer davantage dans les histoires parisiennes", M. Montebourg précise qu'en Saône-et-Loire, /... "il y aura aussi une candidature socialiste locale qui fera battre le candidat des Verts" dans la circonscription réservée aux écologistes en vertu de l'accord PS-EELV.
"L'écologie n'est pas réductible à la lutte contre le nucléaire, et laisser le monopole de la défense de l'environnement aux Verts est une erreur" /...
A lire demain. Quelle modification institutionnelle est indispensable pour éviter de tels grenouillages, de telles magouilles, qui perturbent la politique remplacée par des manoeuvres politicardes qui ne font qu'amplifier le sentiment "tous d'accord entre eux, tous pourris", ce qui ne nourrit en fin de compte que la peste brune? Comment sortir des manoeuvres d'appareil au profit des seuls apparatchiks, pour revenir au débat d'idées?
benjamin borghésio
Les commentaires récents