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L'imposture de la TVA 'sociale' (1) (lien)
Dans la première partie, nous avons mis en évidence la grande "qualité" de la TVA, payée par le seul consommateur résident: son aspect indolore puisqu'il n'y a pas de prélèvement direct fait par le Trésor public. (le visiteur bénéficie des achats hors taxe dès lors que leur montant est conséquent: il paiera éventuellement à son retour selon les dispositions de son pays et au profit de ce dernier**):
** Le touriste règle ses gros achats "hors taxes", les emmène dans on pays d'origine où ils seront éventuellement soumis aux prélèvements locaux à partir d'un certain montant. C'est le principe de fonctionnement des "duty free" - commerces où on achète hors taxe dans les zones sous douane des aéroports, qui sont la lpupart du temps des arnaques: les marges sont suffisamment hypertrophiées pour que le prix HT soit en général équivalent voire supérieur au prix TTC en ville.
Impôt sur la consommation, la TVA est payée par tous y compris par l'exclu qui ne dépend que de maigres ressources liées à la solidarité nationale, lesquelles lui permettent tout juste de survivre car la quasi totalité des biens et services lui sont soumis. Les consommateurs s’acquittent seuls de cet impôt sur la nourriture, sur l’habillement, sur l’énergie, sur l’ameublement et même sur les médicaments essentiels.
Nous l'avons évoqué, les taux d’imposition sont loin d’être anodins (19,6 % pour le taux normal, 5,5 % pour le taux réduit concernant principalement certains produits alimentaires, 7% pour des prestations pourtant essentielles comme les transports en commun). Vous donnez quelques euros à un SDF pour qu'il s'achète un sandwich? Il paiera environ 0,20 euros d'impôt pour manger, en proportion autant que le nouveau riche qui mange à la carte au Fouquet's (menu d'entrée de gamme: 70 euros).
Rappelons que cette taxe s’applique uniquement sur le consommateur final: les entreprises se font rembourser la TVA payée sur leurs achats.
Simplifions, parce que le fisc dispose depuis la nuit des temps d'une créativité infinie pour imaginer des impôts et taxes: des générations de gosses furent longtemps rachitiques et anémiés à cause d'un impôt proportionnel à la surface des portes et fenêtres, qui les privait de la lumière du jour. On dénombrait des milliers de morts chaque année dues aux intoxications alimentaires: le prix du sel était multiplié par vingt du fait de la gabelle... or c'était le seul moyen connu pour conserver viande et poisson.
Nous avons des impôts calculés...
- en fonction de la consommation (les 2/3 des recettes budgétaires françaises, les deux plus gros morceaux étant constitués par la TVA et la TIPP - taxe intérieure sur les produits pétroliers)
- en fonction des revenus (ceux du capital, ceux du travail), ces derniers étant eux même pondérés (ce qu'on appelle "l'assiette d'imposition") par le biais de divers niches et abattements qui permettent aux petits malins et aux plus favorisés de n'être imposés que sur une fraction très réduite de ce qu'ils gagnent en réalité. Si vous êtes assez aisés pour acheter une pompe à chaleur qui diminuera considérablement votre facture énergétique, vous y êtes aidés par des subventions et des réductions d'impôts (ça vous fait une belle jambe si vous êtes assez pauvre pour ne pas être imposable!) Dans le cas contraire, vous n'avez que le droit d'engloutir des sommes colossales pour tout juste ne pas mourir de froid chez vous.
C'est ainsi que les bénéficiaires du défunt bouclier fiscal (remplacé par une "réforme" de l'ISF qui compense plus que largement sa suppression) touchaient de la part du fisc un chèque censé rembourser ce qu'ils avaient payé au dessus d'un plafond de 50% de leurs ressources... alors que leur imposition réelle ne dépassait pas 20 % de leurs vrais revenus! (taux d'imposition de Liliane Bettencourt cette année: 4%)
L'essentiel des ressources de l'état venant de la TVA, nous aboutissons au paradoxe suivant: celui qui est contraint - bien obligé! - de dépenser tout ce qu'il gagne pour survivre est de facto imposé sur tous ses revenus quand le nanti qui peut épargner ou voyager - larguant son argent en dehors des frontières - ne participe en proportion que beaucoup moins à l'effort public.
La famille française type (25.000 euros de revenus annuels, soit un salaire "médian" et un salaire d'appoint, les deux diminués des frais professionnels) consacre 10,2% de ses revenus à payer la TVA - soit en proportion 1/3 de plus que le malheureux couple sans enfants qui se contente de 100.000 euros par mois pour survivre péniblement.
On comprend pourquoi oser parler de TVA "sociale", c'est un peu comme décerner le titre de bienfaiteur de la jeunesse à Marc Dutroux...
Que faudrait-il faire, alors, même à "revenu constant" pour l'Etat"?
Il faut réduire sa place de la TVA, impôt injuste s'il en est, au profit de la fiscalité directe. On cite l'exemple de l'Allemagne (alors que son modèle économique est tout à fait différent: c'est comparer des pommes avec des choux) en oubliant qu'après une forte majoration très impopulaire de TVA (trois points!) elle demeure inférieure au montant français (19% contre 19.6%). Devons nous au nom de la "convergence" (Morano a osé employer ce terme!) passer à 22 voire 24,6% en France contre 19 chez nos voisins?
Il faut préparer cette baisse par l'affichage obligatoire et ostensible du prix hors taxe, quelques semaines avant sa mise en place effective, pour que le consommateur juge de l'honnêteté du distributeur. (la répercutera-t-il ou augmentera-t-il subrepticement ses marges?)
On a en effet l'exemple du passage de 21.6% à 19.6% acté par Fabius sous le gouvernement Jospin, qui coûta des milliards à l'état sans que les prix baissent. A l'époque, l'opposition de droite jugeait la baisse insuffisante. De nos jours elle ne trouve que des vertus à cet impôt qu'elle veut augmenter massivement... allez comprendre!
Il faut pour compenser la baisse de recette liée à la TVA augmenter l’impôt sur le revenu....
- en élaguant la plupart des niches fiscales, dont la plupart sont inutiles sur le plan économique. Quand une personne dépendante a le plus grand mal à payer le temps qu'il faut un auxiliaire de vie, est-il normal qu'un nanti soit défrayé de 50% des honoraires de son "coach de golf" ou de son "masseur certifié bien être" par le biais d'un crédit d'impôt?
- en augmentant les taux de l’impôt sur le revenu principalement pour les plus hauts revenus, en augmentant en outre sa progressivité (passer de quatre à plus de dix tranches) et en supprimant le quotient familial qui ne profite qu'aux plus nantis, le remplaçant par un crédit d'impôts fixe de 600 euros environ par enfant. Contrairement à ce que glapit l'UMP, cette mesure bénéficierait à 90% des foyers fiscaux français
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