C'est le PS qui traînait une image de parti magouilleur composé de tricheurs, après ce désastreux congrès remporté par Aubry contre Royal sur fond de fraudes croisées. Et le relatif succès de leurs primaires ouvertes n'avait effacé que partiellement la désastreuse impression produite sur l'opinion.
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Cette note a été rédigée lundi 19 novembre à 16h, alors que les résultats officiels n'ont toujours pas été proclamés; de toute manière, ils seront contestés quel que soit le vainqueur. Quels qu'ils soient, ils ne changeront pas l'analyse suivante.
Un florilège des déclarations de l'UMP après le scandaleux congrès PS de Reims (2008) (lien)
Ce scrutin pour élire le président de l'UMP fut celui de toutes les magouilles, Copé n'ayant rien ménagé pour l'emporter alors qu'il ne partait pas, euphémisme, en position de favori. On se rappellera que ce parti était, en violation de ses statuts, sans président depuis 2007 (ukase de Sarkozy qui désignait en outre le secrétaire général: Bertrand, puis Copé)
Tout d'abord ce dernier qui tenait la machine du parti l'a mise à son service exclusif. Le scrutin a été rendu compliqué pour la masse des militants par le refus du vote électronique - procédure pourtant en cours habituellement au sein du mouvement -, la limitation du nombre de bureaux, ce qui rendait les opérations longues et fastidieuses et contraignait les électeurs à effecter un parcours de plusieurs dizaines de kilomètres avant de faire la queue, des heures durant: dans ces conditions, ce sont les plus motivés qui demeurent, les autres, simples adhérents moins impliqués se décourageant. Ou Copé fut machiavélique, ou il fut d'une incompétence totale, puisqu'il avait la responsabilité du parti.
Dans ces conditions, Fillon, ex Premier Ministre, qui devait séduire les modérés, les raisonnables, partait avec un incontestable handicap qu'il avait dénoncé par anticipation. En outre, il a mené une campagne que l'on qualifiera de pépère, s'adressant aux notables, gêné de surcroît par un accident de scooter puis par une crise de coliques néphrétiques: le "malheureux", amateur de grande vitesse et qui bénéficie habituellement d'une santé de fer a perdu ainsi des jours de précieuse campagne donnant de lui une image de fragilité que son rival a honteusement exploitée.
Pendant ce temps, l'Aigre de Meaux se démultipliait, accumulait les promesses susceptibles de plaire aux ultras, surjouait la droite sardine à l'huile opposée aux beaux esprits de Saint-Germain des Prés (sic), lui qui est né avec une cuillère d'or massif dans la bouche et qui, sa vie durant, ne quitta guère ces beaux quartiers qu'il honnit (maire de Meaux, il n'y réside pas, ayant acquis un grand appartement dans un des endroits parmi les plus luxueux de Paris) : plus c'est gros, plus ça passe et en politique politicienne, il ne faut jamais craindre de surjouer.
Une chose est sûre: même si au finish Fillon l'emporte et que Copé accepte sa défaite, le clivage est éclatant entre l'appareil militant UMP et les sympatisants de droite, gens en général convenables et bien élevés, que les méthodes "limite" de Copé choquaient: tous les sondages indiquaient la préférence de ces sympathisants, contredits par les militants: de même que le PS se prend à gauche pour faire ensuite une politique de droite, l'UMP se prend sur sa droite (pour appliquer ensuite une politique encore plus à droite - c'est là qu'on trouve le lézard).
Copé annonçant sa "victoire" 24h avant la commission de contrôle.
Cela dit, que Fillon perde ou qu'il gagne à l'arraché, on constate qu'avoir fait ses preuves électorales est un atout. On ne peut retirer cela à Copé: en 1995, jeune et peu expérimenté, il ne partait pas favori pour sa conquête de Meaux, prise à un notable socialiste certes sur le déclin, mais qu'on n'imaginait guère perdant. Un peu trop présomptueux en 1997, il perdit son siège de député faute d'avoir assez labouré le terrain: il se l'est tenu pour dit, et a "bétonné" son fief comme peu de politiciens le font.
Fillon hérita en 1981 d'un bantoustan de droite: la succession de le Theule, fief où même les vaches votaient RPR. Trente ans durant, il en a profité avant de la déserter en 2012, dès que la sociologie locale rendait le combat risqué, faisant le coucou à Paris dans une des circonscriptions les plus à droite de la capitale mais en n'osant pas se positionner comme challenger de la droite pour le combat des municipales de 2014. A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire... Il est clair que sa vie durant, Fillon qui souvent varia, fut constant sur ce point: le refus de la moindre prise de risque.
La suite promet d'être sanglante. Comparons avec le PS. Après sa défaite... controversée, on va dire, face à Aubry, Royal s'est soumise en partie parce que son camp n'était pas blanc bleu (quand on est soutenue par la fédération de l'Hérault, on est mal placée pour faire l'oie blanche) et parce qu'un combat en justice collait mal avec l'image christique que se donnait la Madonne du Poitou.
Là, que ce soit Copé ou Fillon, le perdant et son entourage seront de vrais méchants: il serait prudent de demander l'intervention des casques bleus (sur la twittosphère, déjà, ça ne gazouille pas: ça croasse ou ça ricane et le pauvre Juppé qui tente de rappeler tout le monde à la raison s'égosille dans le vide)
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Accordons néanmoins sans difficulté le Prix du culot et du cynisme à Harlem Désir, qui ose discourir sur le scrutin controversé de l'UMP. Désir, chacun se souvient des moeurs socialistes en 2008 et sincèrement, toi et tes camarades, vous auriez intérêt à faire les autruches.
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Mais au sein de la vraie gauche, nous n'avons pas à choisir entre Copé et Fillon, surtout quand la "révolution copernicienne" (dixit Moscovici) officialisée par les socialistes démontre à ceux qui en doutaient encore que le personnel au pouvoir ne satisfera pas plus les besoins et les aspirations populaires que l'UMP.
On ne pourrait que grogner devant ce tapis rouge offert aux séides de le Pen, mais l'UMP ayant épousé le discours du FN, on dira que bonnet brun et brun bonnet, ça n'offre pas une alternative crédible. Le débat est là: choix entre une politique libérale sur le plan économique et rance sur le plan sociétal, la même qu'elle soit portée par Copé ou Fillon, et une autre encore plus soumise aux diktats de la finance comme aux injonctions allemandes, parée d'un peu de sociétalisme dont le peuple n'a rien à cirer.
benjamin borghésio
Mise à jour le 20 novembre.
Copé l'a emporté avec 98 voix d'avance (50,3% des voix). Grand seigneur, il a proposé la vice-présidence de l'UMP à Fillon, mais les réactions des partisans de ce dernier, pour le moment, ne semblent pas enthousiastes.
Fillon a finalement "pris acte du résultat", sans "s'en satisfaire". "Les méthodes qui se sont déployées [lors de l'élection] ne rencontrent de ma part aucune approbation. Mais au-delà des nombreuses irrégularités de ce scrutin que j'aurais pu contester,
ce qui me frappe ce soir, c'est que la fracture qui traverse notre camp
politique est manifeste. Elle est à la fois politique et morale ; la
réduire et la dépasser, tel est l'objectif que je m'assigne". Il a affirmé qu'il prenait quelques jours pour déterminer "les formes que prendra, à l'avenir [son] engagement politique".
Ciotti, directeur de campagne de Fillon, a immédiatement qualifié la proposition [d'attribuer la vice-présidence à Fillon] de "grotesque", dans des propos rapportés par l'AFP.
Wauquiez, vice-président dans le ticket de M. Fillon, assure qu'il "n'ira pas à la soupe". "On ne va pas entrer dans des tractations de postes, affirme le député de la Haute-Loire.
Le parti est épuisé par une élection très difficile, épuisé par la
défaite. On a donné une image lamentable ces derniers jours. On ne va
pas rajouter l'indignité à la médiocrité. Nous allons essayer de faire bouger
les choses de l'intérieur, mais je n'ai jamais construit mon parcours
sur la trahison. Je reste fidèle à François et aux valeurs que nous
avons défendues."
Chartier, qui était chargé de conduire l'équipe des porte-parole de l'ancien candidat malheureux. "Nous faisons tous l'objet de propositions des uns et des autres mais l'heure n'est pas à cela, indique le député du Val-d'Oise. François est plus déterminé que jamais à participer à un projet de reconstruction. Il y a un vrai clivage dans notre famille politique. Nous allons continuer à nous faire entendre. Nous allons évidemment continuer à nous réunir. Pratiquement la moitié des adhérents de l'UMP a voté pour François Fillon. Nous allons veiller à ce que leur parole puisse continuer à être entendue. Nous ne sommes pas près de disparaître de la scène politique."
Gageons que malgré toutes ces belles promesses, le temps viendra bientôt d'aller à la gamelle et qu'un certain nombre de ces excellences saura "écouter l'intérêt du mouvement", surtout s'ils se confond avec leur propre promotion
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