On s'en moque: nul n'est obligé d'être ministre. Que les salariés de Florange soient maintenus sous le joug d'un patron voyou qui n'a jamais tenu sa parole où que ce soit dans le monde et qui ne la tiendra pas davantage dans les mois à venir, c'est une autre paire de manches.
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Même la CFDT, syndicat collabo s'il en est qui, à force de chercher le consensus devance les désirs les plus fous du Medef (il n'est que de lire les lauriers que Parisot a tressés à Chérèque avant son départ pour une sinécure fort bien payée à L'IGAS), se déclare écoeurée par le mensonge et les berceuses gouvernementales.
Le ministre du Travail Michel Sapin a assuré que le gouvernement veillerait à ce que chaque engagement pris par Mittal soit "scrupuleusement respecté". © Alain Jocard / AFP / Oui, et si ma tante en avait deux qui pendent, on l'appellerait Tonton.
D'abord,Sapin ment avec aplomb en présentant comme une victoire le fait que les 600 salariés de la filière chaude (les hauts-fourneaux producteurs de fonte) ne seront pas licenciés: il y aura bien perte d'effectifs par départs "volontaires" non compensés, reclassements, etc. Et surtout, on se tait pudiquement sur les 3.000 emplois de sous-traitance directe, sur les intérimaires et sans doute sur un nombre équivalent d'emplois induits.
On remarquera que les nationalisations, considérées en Europe comme une soviétisation de l'économie, ont été employées avec succès aux USA (Obama a ainsi sauvé GM, de même que le secteur bancaire) et il semble quelque peu excessif de taxer l'Amérique de communisme tout comme de Gaulle était tout sauf un stalinien, lorsqu'il mit en oeuvre le programme du CNR à la Libération. Là encore, bourrage de crâne indigne de l'opinion.
Faut-il laisser mourir nos cathédrales industrielles et les deux siècles de savoir-faire qu'elles symbolisent?
Ensuite il y a eu une propagande écoeurante visant à persuader l'opinion publique que "faire de la fonte et de l'acier brut, ce n'est pas l'avenir" (sauf à considérer que la crise économique actuelle est éternelle, que l'industrie automobile européenne est morte, que le bâtiment ne repartira jamais, donc qu'on n'aura plus besoin de fer à béton: dans ce cas, le modèle économique actuel est voué à l'échec, il faut le reconnaître et en changer en passant au vrai socialisme). Passé à la trappe ou peu s'en faut, le projet pilote "Ulcos" (lien) de captage du CO2 qui permettrait de réaliser de substantielles économies par le biais des quotas d'émission de gaz à effet de serre, cela avant d'imposer à l'acier produit par dumping environnemental une vraie taxe carbone!
Preuve est ainsi, une fois de plus, que l'UE sous sa forme actuelle ne sert à rien. En temps de vaches maigres, elle est sommée de faire des économies et quels sont les postes budgétaires qu'elle se propose de réduire massivement?
- L'aide aux banques alimentaires, quand sa politique néo-libérale insensée et les dérives de la finance qu'elle ne contrôle pas ont poussé des millions de gens dans la misère.
- Le programme Erasmus qui permet aux étudiants de s'ouvrir sur le monde en passant une année dans une université étrangère;
- Enfin, et c'est ce qui nous préoccupe en ce qui concerne Florange, de vrais investissements dans la lutte contre les émissions de carbone, le mal absolu en matière de ravages environnementaux.
Et on voudrait nous faire aimer cette Europe?
Retour à la "casse" départ. Mittal a "promis" d'investir 180 millions d'euros. Sans doute comme il a promis de payer le milliard d'euros qu'il doit au Trésor public. Il est clair que s'il réalise un investissement minime, ce sera dans la filière froide et pas sur les haut-fourneaux... On susurre même que ce sera difficile de remettre en route un équipement abandonné depuis deux ans: mais qui a sciemment négligé son entretien?
La sidérurgie européenne est un secteur stratégique. Hors les moments conjoncturels où la demande en acier baisse suite aux errements de l'économie financiarisée, et à ces moments il faut soutenir ce secteur tout comme il serait impensable qu'on laisse mourir notre agriculture, il y a adéquation entre la production locale et la demande.
Que Mittal, qui a fait tant d'acquisitions irraisonnées et tant d'erreurs stratégiques que son groupe est lourdement endetté, qui partout a manqué à la parole donnée**, et fort mal noté par les sacro saintes agences pour tout ce qui précède se concentre sur ses bases: l'Inde, et les pays voisins. La Chine, par exemple, consomme le quart du fer à béton produit dans le monde.
Et que nous, européen, soyons maîtres de notre destin ou si ce n'est pas possible, que la France reprenne ses billes. Basta avec ces vampires qui n'achètent des groupes industriels que pour les dépecer, les fermer et créer ainsi la pénurie d'offre qui leur permettra de fournir le monde avec leurs fournitures obtenues au mépris de toute norme sociale, fiscale et environnementale. Et pour un secteur stratégique, certes il faut le structurer pour qu'à défaut de rapporter gros, il ne coûte pas excessivement. Mais un déficit raisonnable qui permettrait de conserver du lien social dans une région déjà sinistrée, de limiter le déficit de la balance commerciale tout comme celui de l'UNEDIC et des caisses de retraite est parfaitement concevable.
** On ne déteste pas Mittal par racisme anti-indien comme les valets serviles de la doxa libérale le sussurent: on le hait parce que c'est un exploiteur dénué de tout scrupule.
Enfin, il faudra bien un jour que Hollande cesse de nous jouer Guignol et ses marionnettes avec une représentation politicienne caricaturale: un Montebourg et sa Geste simili révolutionnaire qui le garde sur sa gauche, un Moscovici qui le flanque à droite et qui l'emporte systématiquement. On ne joue pas avec l'espoir des salariés, on n'a pas le droit de leur mentir, de les bercer d'illusions.
D'un Sarkozy, on n'attendait pas mieux: on connaît la politique de la droite dure inféodée au patronat. D'un type qui se prétend de gauche et qui, sur place, avait fait des promesses formelles pendant la campagne, qui a laissé son ministre les réitérer avant de le déjuger quelques jours après, on a la droit non pas d'être déçu, mais de ressentir de l'écoeurement face à ce désastre.
benjamin borghésio
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