Quand la propagation de rumeurs toutes aussi absurdes les unes que les autres et qui ne doivent sans doute rien au hasard, quand des ententes sur les prix, quand de curieuses pratiques commerciales, quand les caprices des uns ou des autres coutent fort cher à la Sécu, donc à nous tous.
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On citera pour exemple le docteur Even, pneumologue de renom, qui dénonce la psychose bien française contre les génériques accusés de tous les maux et victimes de rumeurs malveillantes sans doute orchestrées qui font état d'inefficacité ou d'effets secondaires indésirables. Ce médecin, qui codirigea avec le Professeur Bernard Debré un
retentissant Guide des 4000 médicaments inutiles et dangereux. est
pourtant peu suspect de sympathie envers le monde du médicament.
C'est quoi, un générique?
C'est la copie d'un médicament tombé dans le domaine public, une fois que les frais de recherche et de développement ont été amortis. Il contient le même principe actif, au même dosage, et s'administre de la même manière. Le nom sous lequel il est vendu est celui de la molécule, et le pharmacien consciencieux marquera clairement sur la boîte "se susbstitue à..." si d'aventure le médecin prescripteur a employé la dénomination commerciale sur l'ordonnance. Par exemple, l'anti-hypertenseur "Hypérium" a son équivalent générique "Rilménidime"
Y-a-t-il des différences de composition entre le princeps (produit d'origine) et le générique?
Parfois oui au niveau des excipients qui, associés à la molécule active permettent de la conserver dans le temps, de la libérer dans l'organisme de telle ou telle manière, de la "marquer" pour qu'en cas d'ingestion accidentelle il soit plus facile de détecter la prise de médicament inadéquate, etc.
Contrairement à une rumeur tenace, rien ne permet de dire que les excipients employés pour fabriquer les génériques suscitent plus d'effets indésirables: dans un cas, ce seront ceux du princeps qui seront à leur origine, dans l'autre, ceux du générique et dans 998 cas sur 1000, aucun.
Cette affaire de "liberté de choix" à laisser au médecin ou au patient est inadmissible, car il n'y a pas de liberté sans responsabilité.
Certains médecins ont sans doute une personnalité falote et qui de ce fait, se sentant obligés de démontrer leur autorité, indiquent systématiquement sur l'ordonnance, sans motif: "non substituable" - et cela interdit au pharmacien de donner un générique. Rendons la vie plus difficile à ces praticiens (qui parfois aussi n'osent pas refuser les desidératas infondés de leur clientèle) en leur imposant d'expliquer les motifs précis de la non substitution. par exemple, "intolérance reconnue à tel excipient, l'incident thérapeutique étant survenu le... à... dans telle circonstance"; "personne très âgée habituée depuis des années à prendre le princeps, et susceptible de commettre une erreur de prise", etc.
Le trop grand nombre de dispenses permettrait d'orienter les contrôles et de sanctionner les praticiens abusifs, par un déconventionnement à temps, voire définitif: payés en majorité et même si c'est de façon détournée par des fonds publics et par des mutuelles, les médecins ont des devoirs envers la puissance publique!
Quand il n'y a pas de substitution indispensable, obligeons les médecins à indiquer le nom de la molécule sur l'ordonnance, en lieu et place de la dénomination commerciale.
Certains patients font encore des caprices en refusant par principe les génériques, acceptant de renoncer au tiers payant, d'avancer les frais d'achat et d'envoyer leur feuille de maladie à leur caisse... mais imposant à cette dernière de lourds frais de traitement administratif, supportés par l'ensemble des cotisants et ça, c'est inadmissible.
Donc que ceux qui s'obstinent à infliger des frais indus à la Sécu payent l'intégralité de leur médicament, car il n'y a pas de liberté sans responsabilité: cette "liberté" doit se payer au juste prix.
Je ne veux plus, en tant qu'assujetti à la Sécu, en tant que mutualiste, en tant que contribuable, payer pour des personnes qui font des caprices ou qui écoutent les rumeurs les plus absurdes. Liberté de choisir le princeps, mais on paye cash.
Autre chose: le médicament n'est pas un produit comme les autres puisque son financement est payé majoritairement, via les remboursements, par des fonds publics; en conséquence, il doit y avoir un contrôle des prix des génériques pour éviter que leur prix soit quasiment celui du princeps alors que les frais de R&D sont amortis voire, dans certains cas, qu'ils coutent plus cher! En effet, nombreux sont les labos qui ont développé en marge une filiale "générique" prête à prendre le relais de production dès lors que leurs médicaments tombent dans le domaine public, et qui fixent des rpix ne reflétant en aucun cas la réalité économique.
Voilà exactement le domaine dans lequel une entreprise publique à même d'acheter les principes actifs et de fabriquer des génériques sans profit excessif aurait un rôle d'intérêt général. Son existence serait l'arme de dissuasion massive qui interdirait aux laboratoires de pratiquer des ententes abusives ou de surfacturer des produits depuis longtemps amortis.
Les laboratoires pharmaceutiques vont encore pleurer... Laissons les faire, en rappelant que depuis des années, leurs frais de promotion commerciale sont supérieurs aux frais de recherche et de développement derrière lesquels ils s'abritent pour justifier des bénéfices parfois obscènes.
Une dernière chose, à propos des effets indésirables des excipients. Ceux qui se gargarisent de l'argument omettent une donnée essentielle: quand on prend un médicament supposément efficace, les effets indésirables sont hélas incontournables dans un certain nombre de situations et avant de s'inquiéter de ceux des excipients, on se préoccupera des conséquences de l'ingestion des molécules actives sinon pour les prohiber, du moins pour les limiter.
C'est une vérité établie: les Français sont sur la plus haute marche du podium pour la prise de médicaments et ils ne sont pourtant pas mieux soignés que leurs voisions allemands, hollandais, belges, etc. C'est toute une éducation à faire tant auprès des médecins que des patients, pour les convaincre qu'une bonne consultation ne débouche pas forcément sur la délivrance d'une ordonnance (surtout si on ajoute que la surconsommation ou la consommation erronée de médicaments tue chaque année des milliers de gens, surtout des personnes âgées, et en rend des centaines de milliers encore plus malades).
benjamin borghésio
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