La France se meurt, la France est morte... Telle est l'antienne mille fois répétée tant par les libéraux pur-jus que par les "socialistes"
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On ajoutera le postulat: "il faut absolument sauver l'Europe, à n'importe quel prix". On ne se pose même plus la question du rôle de cette Europe telle qu'elle fonctionne, qui a cessé depuis longtemps d'être un moyen destiné à force de compromis, de créer une sphère de coprospérité tout en renforçant les solidarités. Dans le passé, la CEE contribua très largement à aider Grèce, Espagne et Portugal à sortir de leurs dictatures respectives; de nos jours, l'action de l'UE encourage à peu près partout le racisme, la xénophobie et la haine de l'autre par ses actions inconsidérées.
Le bourrage de cranes fonctionne pour nous faire avaler tant et plus la nécessité absolue dans laquelle nous serions de faire des sacrifices pour sortir de la crise – crise dont nous ne sommes, soit-dit en passant, aucunement responsables.
La société est-elle composée en majorité...
De banquiers cupides et de traders vérolés, de fabricants de produits dérivés financiers dont ils ‘ne savent pas comment ça marche mais ça marche alors allons y’ (sic) qui dégagent du 10,15,18 % de rentabilité dans une croissance de 2% les années fastes… (forcément ça doit péter un jour),
De
spéculateurs qui achètent une entreprise sans la payer : ils traient la bête
sans la nourrir en prélevant sur les bénéfices le montant des remboursements d’emprunts, se versent pour faire bonne mesure de gros dividendes et organisent des rachats
d’actions pour augmenter le capital de façon artificielle au lieu
d’investir – enfin ils annoncent d'un air éploré que l'entreprise ainsi vidée de sa substance est
obsolète, que son appareil productif est hors d'âge faute d'investissements et ils la liquident en jetant ses salariés sur le pavé.
Et autres parasites qui perçoivent des revenus énormes chez nous, souvent en grande partie grâce à l’argent public avant de s’exiler dans des paradis fiscaux ou des
dictatures assez glauques. (voir
le scandale des cachets démesurés des vedettes françaises de cinéma dénoncé hier sur ce blog, qui grâce à des aides publiques perçoivent des cachets de cinq à dix fois
plus élevés qu’aux USA)
La liste n'est pas exhaustive.
Tous ces Jean Foutre, ces parasites, ces technocrates europhiles qui se couchent devant la finance et le profit ne cessent de nous le redire: "l’Europe joue sa survie". Non. Une certaine Europe joue sa survie: celle qui est vendue à la finance, à l'ultralibéralisme et à la technocratie bruxelloise.
Prenons l'exemple de la Grande-Bretagne au sein de laquelle l'euroscepticisme grandit et dont il n'est pas insensé de penser que les citoyens contraindront la classe dirigeante à quitter l'UE. Le vieux Delors sort alors de sa retraite pour proposer une solution: "que le Royaume uni sorte de l'Europe, en demeurant dans un grand espace de total libre échange"... Ce qui est exactement le souhait des Rosbifs qui désirent profiter de l'espace économique sans être astreints à des mesures de solidarité. C'est la réédition de Munich, mais cette fois Daladier dessine lui-même la carte qui octroie les nouveaux territoires dévolus à la puissance hostile, au lieu de seulement les avaliser.
Qui osera soutenir que l'Europe, la France en particulier, est en plus mauvaise posture qu’en 1945?
France dont 30% des immeubles étaient alors endommagés ou détruits, dont les mines étaient inondées, dont 80%
des ponts et liaisons ferroviaires étaient inutilisables, qui avait
perdu 500.000 citoyens la plupart en pleine force de l’âge, et qui s’est
reconstruite à force de travail, certes, mais aussi et surtout parce
qu’un pacte social fondé sur autre chose que toujours plus de dumping
social et de nivellement par le bas donnait à tous l’espoir et des
perspectives d’avenir. (et je n’évoque pas les sales guerres coloniales
qui pompaient des ressources colossales au même moment).
A ce compte là on ne peut, rétrospectivement, que remercier de Gaulle qui choisit la voie de Pleven contre celle du (déjà) socio-libéral Mendès-France qui proposait, à la Libération, une décennie de sang, de sueur et de larmes en lieu et place du programme volontariste du CNR
Ça fait trente ans qu’on nous la joue ‘sacrifice, sacrifices,
sacrifices’ pour sortir d'un tunnel dont on ne voit jamais la fin. Pour quels
résultats? Au Japon, c'est pire: ce pays que dans les années 60 on dépeignait
comme le futur maître du monde, est sur le chemin de l'austérité depuis 40 ans.
40 ans de récession et d’endettement (280% du PIB malgré l’austérité,
qui dit mieux?)
Le fameux ‘modèle allemand’ dont on nous chante sans cesse les vertus…
Malgré des atouts incontestables (son industrie est placée sur des
créneaux porteurs: très grosses berlines, preuve que pour ceux pour qui
ça va bien dans le monde, ça va encore mieux, et les machines outils
achetées par milliers par la Chine en attendant qu’elle les copie elle
même).
Il ne fonctionne que grâce à une démographie calamiteuse qui
sera un drame dans dix ou quinze ans: chaque année, 130.000 entrants de
moins sur le marché du travail qu’il n’en sort quand chez nous il faut
créer 150.000 nouveaux postes de travail (à démographie égale, notre
chômage diminuerait de 250.000 personnes par an au lieu d’augmenter) et beaucoup plus de gens en très grande pauvreté (dans ce pays ‘riche’ il y
a deux fois plus de miséreux qu’en France: le SMIC n'existe pas et on y travaille parfois pour cinq
euros de l’heure voire trois ou même… un et le coût de la vie est
sensiblement le même). Quel succès! Quel modèle!
Il est bon de préciser que ce dernier argument n'est pas pris au Front de Gauche: l’ultra libéral François Lenglet dit
exactement la même chose
Cette propagande en faveur d’un capitalisme complètement dévoyé, qui n’a même pas les ‘avantages’ du vrai capitalisme puisqu’il produit de moins en moins de richesses, est au final plus efficace que les pires moments de la geste stalinienne.
Tant qu’on ne changera pas de ‘grille de lecture’, la confrontation d’idées est impossible: cela vaut toutes les censures, même les plus autoritaires.
benjamin borghésio
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