Lundi 14 mars
Au préalable, je signale que je prends un risque puisque cette note programmée pour sortir aujourd'hui a été rédigée samedi - et que j'ignore au moment de la parution les développements de cette affaire entre rédaction et parution. Je prends l'engagement formel de ne pas modifier le texte initial quitte à l'amender, assumant les conséquences d'une erreur d'appréciation.
Au lendemain du plus violent séisme de son histoire, et alors que le Japon subit encore de nombreuses répliques sismiques, l'inquiétude grandit autour de plusieurs centrales nucléaires touchées par le tremblement de terre de magnitude 8,9, et l'impressionnant tsunami qu'il a provoqué vendredi 11 mars.
Le secrétaire général du gouvernement japonais a confirmé samedi matin qu'une explosion et une fuite radioactive s'étaient produites a la centrale de Daiichi, dans la préfecture de Fukushima, située à 240 kilomètres au nord de Tokyo. Les autorités ont ordonné aux habitants d'évacuer la zone dans un rayon de 20 kilomètres autour de la centrale.Quatre employés ont été "légèrement blessés" dans l'explosion qui s'est produite à 15 h 36 heure locale (8 h 36 à Paris). Sur place, la dose de radioactivité reçue par un individu sur le site du sinistre correspond à celle qu'une personne peut absorber au maximum en un an, sous peine de mettre en danger sa santé, a assuré l'agence de presse Kyodo. (lemonde.fr)
Je tiens pour acquis que les nucléophobes vont sauter sur cette nouvelle comme des vautours sur une carcasse en décomposition pour exiger le moratoire immédiat du nucléaire dans le monde entier et le démantèlement des centrales dans les six mois en surfant sur l'émotion irrationnelle.
Ce genre d'écolos de mes deux semble toujours enchanté quand survient une catastrophe qu'ils pourront exploiter.
Replaçons les éléments dans leur contexte. le Japon est une des zones sismiques parmi les plus intenses recensées dans le monde. La magnitude du séisme a été extrême. On parle (samedi) de 1.500 morts et disparus qui sont bel et bien 1.500 de trop, mais ce nombre est dérisoire par rapport à ce qui arriverait même dans un pays "civilisé" subissant un séisme de magnitude inférieure (Italie récemment) et moins organisé face à ce risque majeur.Idem, dans un port on compterait 10.000 personnes disparues, suite sans doute au tsunami.
On parle de quelques personnes qui ont reçu une dose de radiations excessive (toujours trop, évidemment) dont quatre sérieusement atteintes.
En comparaison, combien de morts directes (coups de grisou, effondrements) provoquées par le charbon? (rien que pour la Chine... des milliers chaque année) Combien de morts indirectes provoquées par la silicose, par l'énorme pollution atmosphérique? Combien de plateformes pétrolières qui tuent et polluent massivement?
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Et si un séisme majeur de cette ampleur survient dans certaines régions française, combien de morts provoquées par la rupture d'un barrage hydro-électrique? Pour le barrage-voûte de Tignes, construit dans les années 50 sur la haute-Isère, j'ai la réponse. Prévu pour résister à une séisme de magnitude 7, sa rupture aurait pour conséquence la destruction rapide de Bourg-saint-Maurice, Moûtiers, Albertville, d'une bonne partie de Grenoble quelques heures plus tard et on aurait 4 mètres d'eau dans les rues de Valence. Comme aucun plan d'évacuation n'est organisé (de toute manière, avec quels moyens? par où?) la pagaille engendrée par une telle tentative générerait une déstructuration totale de la société et, en elle même, des milliers de victimes.
Si le barrage de Tignes se rompt alors que sa réserve est pleine, on pense au bas mot à 200.000 victimes dont les habitants des stations de Tignes et Val d'isère pourtant situées en amont - mais l'appel d'air provoqué par la "vidange" aurait un effet de cyclone, plus les villes de la Tarentaises citées plus haut.
Et si on veut vider la réserve parce qu'il y a une alerte sérieuse, il faut dix jours au bas mot, avec la destruction du village en aval de Tignes les Brévières et le ravage de la haute Tarentaise tant le débit serait important.
Cela dit... il est légitimement permis de penser que du fait de la sismicité majeure au Japon, malgré les normes de sécurité considérablement renforcées, le choix du nucléaire était peut être inopportun... et en outre ce pays est le seul à avoir subi "dans sa chair" les conséquences majeures du nucléaire quand il est employé à son paroxysme (Tchernobyl à côté d'Hiroshima et de Nagasaki, c'est de la bibine) là on touche non pas au rationnel, mais à la souffrance d'un peuple meurtri au plus profond de sa chair, et cette donnée est à prendre en compte - au moins autant que des considérations économiques et techniques.
Comme promis, amendement sans modification, copié-collé dimanche (Le sinistre serait classé 4 sur une échelle de 7 )
Les ministres n'ont pas pour fonction d'affoler les populations ni de se livrer à des spéculations incertaines et lugubres. En cas de catastrophe, le calme et la modération sont indispensables. Pourtant il faut craindre qu'Eric Besson et Nathalie Kosciusko-Morizet, chargés de s'exprimer au nom du gouvernement français sur l'accident qui frappe la centrale de Fukushima aient commis une singulière boulette.
Tout à son humeur lénifiante, Eric Besson exclut avec une mâle assurance qu'il puisse s'agir d'une "catastrophe nucléaire". Au même moment, les autorités japonaises font évacuer des villes entières, avouent plusieurs cas d'irradiation grave et sans se montrer alarmistes, incitent malgré tout la population à "se préparer au pire". Le décalage entre les propos français et la situation nippone est tel qu'on a le sentiment d'assister à un remake des inénarrables atermoiements qui ont suivi la catastrophe de Tchernobyl en 1986. Ce n'est pas une catastrophe nucléaire ? Mais alors qu'est-ce donc, madame la Marquise ? Un incident, une bêtise ? La mort de notre jument grise ? La centrale de Fukushima serait-elle une usine de farces et attrapes ? Une fabrique de carton-pâte ? Peut-on suggérer aux deux ministres d'attendre des informations complètes avant de livrer un jugement aussi définitif ?
Symétriquement, les chefs de file écologistes, sans disposer de beaucoup plus d'éléments, tiennent sans retenue le langage de l'apocalypse. Il faut aussitôt sortir du nucléaire, tout arrêter, faire demi-tour sans information ni réflexion.
Pendant ce temps, le citoyen cherche à se faire un idée plus lucide sur l'ampleur de la catastrophe, ses causes et ses conséquences. Ce bon sens l'honore, surtout quand il a déserté palais officiels et sièges des partis politiques. (Laurent Joffrin, NouvelObs.com)
benjamin
Un amendement à cette note, le mardi 15 au soir
Fidèle à ma ligne de conduite initiale et tentant de ne pas réagir de façon pavlovienne, je réactualise au vu des informations récentes.
L'enceinte de confinement d'un réacteur a subi des brèches notables. De ce fait, la portée de l'accident est considérablement plus élevée. Il est d'ailleurs désormais classé 6/7.
La question est de savoir si les Japonais (avec, si on le leur propose et s'ils estiment en avoir besoin l'aide internationale) parviendront à colmater ces brèches au plus vite. dans ce cas, on aura un désastre industriel sans conséquence notable sur l'environnement. Dans le cas contraire, on aura un désatre majeur. Rappelons, puisque certains s'obstinent à comparer cette catastrophe avec celle de Tchernobyl que sur ce dernier réacteur il n'y avait aucune enceinte et qu'il a fallu de ce fait non pas combler des brèches, mais bel et bien fabriquer un gigantesque sarcophage.
Je suppose que Duflot et Joly dansent de joie: une aggravation va leur permettre de piailler en toute indécence, comme elles ne cessent de le faire depuis le début. espérons que dans le sens opposé, Besson ne va pas recommencer son négationnisme imbécile.
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Lire ou relire : gaz de schiste en Seine & Marne (NB: cette note est la plus parcourue, depuis l'ouverture de ce blog)
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